Elindine d'Enumasam
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Retranscription MP Discord Nezami/Elindine
Elindine avait répondu avec finesse et promptitude à la Renarde. La question qu'elle lui renvoyait lui fit légèrement pencher la tête sur le côté pour regarder la roublarde par en dessous avec un rictus charmeur.
- Y a pas grand-chose à faire dans le secteur ces derniers temps et je suis pas réputée pour me laisser bastonner facilement. Et comme vous êtes toutes deux de bien jolis morceaux...
Elle ponctua sa phrase d'un clin d'œil fugace et elle se cambra subrepticement pour rapprocher ses lèvres d'Elindine :
- Alors ? Quel endroit discret pourrions-nous trouver pour discuter en nous mettant à l'aise ?
Sans s'écarter, ni se rapprocher, Elindine répondit doucement, la voix basse et chaleureuse.
- On a une chambre à l'étage.
Elle se sentait un peu rassurée sur les intentions de l’aventurière. La marchande avait fait la fière, mais elle ne le serait pas restée longtemps en combat singulier face à la Renarde. Son épaule était encore douloureuse, un handicap qui aurait pu lui couter une belle rouste face à quelqu'un de plus dégourdi que les malfrats des ruelles.
L'aventurière fit une moue gênée mais accepta la proposition. D'un regard volontairement insistant, elle fixa l'arme qui pendait à la ceinture d'Elindine pour lui envoyer un signal. Et au cas où ça ne suffise pas, elle déboucla sa ceinture et fit passer son fourreau par-dessus le comptoir :
- Tu peux me garder ça, Johnny boy ? Commanda-t-elle au barman en continuant de fixer la bourgeoise de la Cité Franche... Nous n'en aurons pas besoin où nous allons, n'est-ce pas ?
Et Elindine savait exactement à qui elle s'adressait réellement et ce qu'elle attendait d'elles.
Ce fut donc Avec un sourire plus aimable, plus sincère, qu’elle imita l'aventurière et remit ses propres armes au barman.
- Je vous les confie un instant. Merci.
Plus légère de quelques kilos qui pesaient lourd sur son sentiment de sécurité, elle se redressa et se dirigea d'un pas leste vers l'escalier, se retournant à demi pour inviter d'un geste galant la rousse à la suivre.
L'halfeline imita les deux femmes et le trio se mit en marche dans l'escalier où Elindine guida jusqu'à leur chambre. Elle l'ouvrit délicatement et invita sa "nouvelle amie" à entrer. La renarde entra d'un pas sûr mais il ne faisait aucun doute que chaque recoin avait été soigneusement inspecté pour s'assurer de sa sécurité. Visiblement satisfaite, l'aventurière retira ses bottes et alla s'enfoncer dans un lourd fauteuil individuel, étalant ses membres sur les bras du fauteuil. La place ne semblait pas le fruit du hasard : de là où elle était, elle embrassait toute la pièce du regard et un angle de mur protégeait son dos.
- Alors ? Qu'avez-vous à me proposer ? Ne croyez pas que je ne sais pas qui vous êtes. Rien de comparable avec moi, mais vous commencez déjà à vous faire une petite réputation dans les parages. Donc, je veux bien garder l'illusion que mes charmes ne vous laissent pas indifférentes, mais je présume qu'il y a un peu plus que ça.
Elle croisa les jambes dans l'autre sens et continua de les fixer avec un sourire satisfait mais avenant.
- Ah... et je prendrais bien un bon ruhm, si vous avez ça, mes jolies.
Elindine referma la porte et considéra leur "invitée" quelques secondes, attentive. A sa demande elle regarda un bref instant autour de la pièce avant d'apercevoir, en effet, une bouteille de rhum déposée avec ses verres, sur un plateau. Elle s'en saisit et dans un geste à l'élégance rudement apprise, servit deux verres, un troisième si Cymbeline acquiesçait à un rapide regard interrogatif. Elle plaça délicatement sa boisson en face de la Renarde et s'installa elle-même sur une chaise molletonnée, croisant les jambes, une main sur un accoudoir, l'autre posée de sorte à accueillir sa tempe contre ses phalanges. Elle répondit enfin, la voix chaleureuse, passant au tutoiement sans même y songer :
- Ne puis-je pas apprécier ta beauté et tes compétences ?
Elle se redressa et son sourire revint, malicieux d'abord, puis plus tranquille.
- Mais trêve de flagornerie, nous avons fait quelques recherches sur les maux qui confinent la ville et, plus nous avançons, plus il semble évident qu'il faudra tôt ou tard s'approcher et explorer les ruines dans la jungle. On m'a dit que tu étais la plus à même de nous aider dans cette tâche. Est-ce bien vrai ?
La question ne portait pas tant sur les compétences de l'aventurière que sur sa volonté de les mettre en œuvre. Chaque geste, chaque regard, chaque pas dans la pièce avait été une confirmation des rumeurs et l'expression sur le visage d'Elindine, jusqu'au ton de sa voix, témoignait sans fard d'un respect certain pour son invitée. Cette femme arborait tout ce qu'elle désirait et de bien des façons.
Le visage de la Renarde s'assombrit un peu. Enfin, ce n'était pas le terme exact. Disons qu'un voile difficile à identifier passa un instant sur son visage et s'en échappa aussitôt. Et guida son attitude alanguie pour redevenir plus sérieuse :
- Hum... Il y a beaucoup de conditions à ta proposition, chérie. D'une part, tout a été rapatrié et les recherches interrompues compte-tenu de la dangerosité de la jungle depuis quelques semaines. Vous savez peut-être qu'il y a eu des pertes là-bas. Il faudrait soit que la situation évolue de ce côté-là, ne serait-ce que pour que les autorités donnent leur autorisation, soit que l'équipée soit particulièrement bien protégée et là aussi, difficile de faire sans le gouverneur.
Son regard passa un instant sur Cymbeline et revint sur Elindine avec son déjà célèbre regard par en dessous :
- A moins que vous n'envisagiez quelque chose de plus "wild" avec une équipe très légère. Du coup il faudrait savoir exactement ce que tu veux aller faire dans les ruines... le tourisme à grand frisson étant hors de propos, même si je me doute que ce n'était pas votre idée.
Elle finit par reprendre sa nonchalance initiale, récupéra son verre de rhum et se mit à boire par petites gorgées délicates qui dénotaient de ses habitudes familières. Puis, levant le nez de son verre.
- Après, dis-toi qu'avec moi, tout est possible... à condition d'y mettre le prix.
Un rire rauque, mais chaleureux répondit à l'intervention de la Renarde. Elindine porta l’alcool à ses lèvres, touchant à peine le liquide ambré, avant de le reposer.
- Les modalités financières seront discutées avec mon cher et tendre, le joli brun, barbu, qui parle trop et sourit plus encore, répondit-elle. Pour le moment, nous sommes encore dans la prospection, nous essayons de savoir s'il faudra agir en sauvage ou en bon urbain. Visiblement, ici, la frontière est fine.
Ses jambes se décroisèrent, ses coudes sur ses genoux, le menton posé sur le dos de ses doigts entrecroisés.
- Soyons positives et imaginons un futur où les choses se passent au mieux pour nous. Dans l'idéal et en prenant les meilleures conditions possibles, la bénédiction des autorités et des fonds généreux, que nous conseilles-tu pour une expédition la plus sûre et la mieux préparée en termes d'équipements et d'expertises ?
La Renarde ne cilla pas et répondit du tac au tac :
- Tant que je ne sais pas ce que vous voulez faire EXACTEMENT dans les ruines, je ne peux savoir quelle expédition préparer...
Elindine soupira. C'était une bonne réponse. A vrai dire elle ne savait même pas à quoi ressemblait ces fichues ruines. Elle se redressa et croisa les bras en faisant rouler son épaule douloureuse.
- Pour le moment, on pense qu'il faudrait remettre un artefact spécifique à sa place. On ne sait pas encore lequel, seulement qu'il est en ville. J'imagine que c'est insuffisant, comme information ?
Encore une fois, la Renarde ne cilla pas. Soit, rien ne l'étonnait, soit elle était fichtrement forte pour neutraliser sa surprise. En tout cas, elle réfléchit un instant, remit ses lèvres contre le verre plus pour se donner une contenance que réellement s'enivrer, et se leva finalement d'un bond souple. Elle semblait réfléchir à toute allure en faisant quelques pas.
Cette attitude mettait un peu Cymbeline mal à l'aise ou bien la captivait. Elle habituellement si volubile ne disait rien et ne bronchait pas plus.
Finalement, la Renarde, qui passait dans le dos d'Elindina, caressa légèrement son épaule douloureuse du bout des doigts avant de se rassoir. Cette épaule n'étant pas particulièrement dénudée, elle avait dû saisir la gestuelle de la roublarde.
- Il faudra soigner ce vilain hématome ma jolie. Nos corps son nos outils de travail et si l'on en prend pas soin... Bref, pour ton affaire, je pense qu'une petite équipe réduite à quelques solides bagarreurs dotés de cerveau et de quoi protéger nos esprits et nos corps de tout ce qui serait "non conventionnel" peut suffire... mais il me manque encore une info vitale : Cet "artefact", il fait quelle taille ?
Puis après un temps d'arrêt :
- Vous pensez que votre manège peut "faire évoluer la situation" à Laälmath ?
La marchande adressa un sourire rassurant à Cymbeline tout en gardant un œil sur le manège de la Renarde. Elle encaissa son commentaire sur son épaule sans trop broncher et nota mentalement les informations qu'elle lui donnait. Rien de particulièrement surprenant, elle voyait déjà quelques personnes qui pourraient figurer sur la liste des "solides bagarreurs". Pour l'équipement, il faudrait prospecter encore davantage, elle n'avait rien vu de tel sur les étals des échoppes en ville. Peut-être simplement que, ici, ce genre de marchandise ne s'étalait pas en plein air. Sa dernière phrase, en revanche, fit lever un sourcil à la rousse. Elle recroisa les jambes et sourit, les paupières légèrement baissées, mais toujours aux aguets.
- Je ne sais pas, répondit-elle, franche. Ce que je sais c'est que nous sommes extérieurs à vos histoires, nous n'avons pas de parti à prendre. C'est à la fois un atout et une faiblesse. Pour le moment, cela nous ouvre des portes, mais notre ignorance nous laisse aussi particulièrement vulnérables à ceux qui voudraient tirer profit de la crise, quitte à éteindre les volontés qui pourraient y mettre un terme.
Elle se pencha vers la Renarde, ses yeux brillant d'une intensité nouvelle.
- Ce que je sais c'est que, dans un panier de crabes maintenus fermés, sans rien qui ne sort ni ne rentre, les crabes s'entre-dévorent et, sans être particulièrement altruiste, je ne veux pas voir ça.
- Hey ! S'insurgea son interlocutrice plus par jeu que par offense. Mais ce ne sont pas "mes histoires"... Ce sont "leurs histoires". Je suis moi aussi une prisonnière collatérale dans cette affaire... Même si je ne me porte pas si mal jusque-là. En tout cas, je partage ton avis : Je crois pouvoir m'en tirer mais je préfère être barrée avant le début de la curée.
Elle se frotta le menton :
- Ton... pardon... Votre histoire m'intéresse. Je ne dis pas que ce sera gratuit loin de là, mais, outre tu as piqué mon excitation, je suis toujours prête à aider une malheureuse ville dans un tel désarroi !
Elle partit d'un petit rire cristallin qui fit basculer sa tête en arrière. Eli remarque alors une cicatrice à la base de son cou sur le côté gauche. Visiblement, une lame, ou autre ustensile du genre, était passée à deux doigts de lui trancher la carotide. La cicatrice était pourtant fine et très propre. Le chirurgien avait bien bossé !
- Bon, et il fait quelle taille ton joujou alors ? Parce que c'est pas pareil d'avoir une bague dans la poche ou un charriot portant une arche de près d'une tonne... si tu vois ce que je veux dire ?
Les yeux de la marchande suivaient les gestes de la Renarde, quelques rides au bord de ses yeux soulignant son sourire.
- Mes excuses, je pensais que tu étais là depuis plus longtemps. J'aurais dû savoir qu'une aventurière de ta trempe ne s'éternise pas au même endroit. Et merci beaucoup pour l'aide, je veillerai à ce que tout travail soit justement rémunéré.
Elle saisit son verre, considérant le rhum d'un regard pensif avant de poursuivre :
- D'après mon époux, le joujou serait une couronne. Aucune idée de ce à quoi elle ressemble en revanche. Nedru continue ses recherches. Mais il va nous falloir un peu de temps avant d'être prêt. Je me débrouille avec une lame, mais je crains que la suite requière... Davantage.
L'aventurière se remit sur ses jambes comme au ralenti et, coulant des mouvements de chat, fit les quelques pas qui la séparaient d'Elindine pour venir poser ses mains sur chacun des accoudoirs du fauteuil.
- Ne t'inquiète pas pour moi, fit-elle avec la voix chaude de celles qui ont l'assurance pour elles, je veille moi-même à ce que mon travail soit justement rémunéré.
Elle s'était encore approchée, enveloppant les prunelles d'Elindine de la chaude intensité de ses yeux noisette mordorés. La jeune bourgeoise pouvait sentir sa légère haleine capiteuse d'alcool.
- En plus, si tu es mariée, je n'ai plus aucun souci à me faire, ajouta-t-elle d'une voix encore plus profonde.
A côté d'elles, Cymbeline remua un peu. En réalité, elle s'était levée mais Eli ne le comprit pas immédiatement.
- Heu... vu que vous parlez de l'organisation technique et que je... hum... que ce n'est pas ma partie, je vais plutôt me rendre utile au rez-de-chaussée. Ne vous inquiétez pas pour moi.
Et elle disparut en moins de temps qu'il ne faut pour le dire, laissant Elindine seule avec cette étonnante inconnue.
Accoudée au bras de son fauteuil, son regard vert plongé dans celui du joli petit fauve qui la dominait, Elindine souriait, tranquille. Elle salua Cymbeline de la main et d'un rire franc, doux et bas.
- Ah ? La plupart des gens tendent à penser que le mariage est plutôt un obstacle à ce genre de... Ah. Rémunération.
- Mais pas des gens comme toi et moi, ronronna-t-elle à quelques centimètres de ses lèvres.
Le sourire sur les lèvres de la marchande s’étira un peu plus. Elle inclina la tête et sa bouche se posa une brève seconde à la commissure de celle de la Renarde. Elle chuchota doucement :
- Comme j’ai dit, nous avons le temps et, si tu es d’accord, je préfère le prendre.
Elle souriait. Elle n’était pas désolée, il lui semblait avoir ouvertement montré qu’elle appréciait l’attention de l’aventurière et qu’elle saurait la lui rendre en temps et en heure. Quand elle aurait ma tête à ça et qu’elles se connaîtraient mieux, notamment. Elindine se redressa lentement, puis se releva.
- Et puis… Je ne paye pas en avance, finit-elle dans un clin d’œil et un léger rire de gorge. Si nous en avons fini pour le moment, je suggère que nous redescendions. J’ai encore bien du travail avant de te proposer une équipe et un plan dignes de tes talents.
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