Elindine d'Enumasam
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Retranscription depuis Discord
Fëanor regardait les échanges entre le marchand et l'aubergiste. Il ne savait pas trop quoi en penser... Il logeait chez l'habitant depuis plusieurs semaines et sa bourse était loin de permettre ce genre de dépense.
Finalement, ils prirent tous place autour d'une table, prêts à écouter le prêtre, légèrement nerveux
- Bien, voyons voir... commença-t-il, cherchant ses mots.
Jetant un coup d'oeil alentour, il semblait vérifier qu'il n'était pas écouté... Finalement, Fëanor se pencha, chuchotant presque.
- Si je ne me trompe pas, vous avez pris une chambre... Peut-être devrions-nous en parler là-bas ? A l'abri des oreilles indiscrètes.
« Je... préfèrerais parler de tout çà là-bas.
Elindine avait observé l'intervention de Cymbeline, puis la réponse de l'aubergiste avec un sourire douloureux. La petite barde s'était un peu avancée. Heureusement, Nedru était intervenu avec toute l'habitude d'un jeune marchand d'antiquités de la Cité Franche. C'était étrange de le voir agir dans cette situation, affublé de vêtements sales et puants, comme il pouvait le faire dans sa boutique, entourés des atours de la petite bourgeoisie. Son sourire s'accentuant et elle se permit même un bref soupir soulagé, bien sue contrariée de payer une telle somme pour une chambre d'auberge. Ils rejoignirent le prêtre à une table et celui-ci semblait enfin disposé à leur expliquer ce qu'il se passait ici. Quelle joie ! À sa proposition de rejoindre leur chambre, elle hocha la tête.
- Nous pourrons toujours manger après un brin de toilette, répondit-elle en se levant lentement.
Ensemble, ils montèrent l’escalier qui menait à la suite. Elindine n’était pas tout à fait sûre de ce qu’elle pensait de ce petit mouvement de foule, mais comme ils attiraient l’attention quoiqu’ils fassent…
Avait-il raison de prendre autant de précautions ? Fëanor était en tout cas au centre de l'attention, ce qui ne le mettait pas particulièrement à l'aise. Il prit une profonde inspiration et se lança.
- Très bien ! Avant de vous dire ce que je sais, j'aimerais avoir en quelques mots vos objectifs ou vos intentions...
« Je veux dire. Vous êtes venus à Laälmath pour quelque chose, et les évènements récents vous ont peut-être convaincu d'en changer...
Une fois dans leur suite, la rousse déposa son sac au pied d'un lit, puis retira son armure et quelques couches de vêtements pour se retrouver en chausse et en chemise. Elle s'assit enfin à la table, soupirant avec lassitude. À la question de Fëanor elle tourna son regard vers son époux, un air un peu fatigué tirant ses traits tachetés.
Une fois monté dans la chambre et sans prendre le temps d'en apprécier le charme, Nedru tira une chaise de la grande table et s'assit dessus avec un profond soupir de soulagement.
- Elindine et moi sommes venus pour faire des affaires. J'avais eu vent des difficultés pour les bateaux marchands de faire la liaison entre ici et Port Franc. Je comptais étudier le problème et négocier de nouveaux contrats au besoin.
Fëanor sourit à Nedru et Elindine, reconnaissant d'avoir répondu à son appel. Il se tourna vers les autres, notamment l'halfeline...
- Pour ma part, je venais surtout m'entretenir avec le gouverneur. J'ai ouï-dire qu'il avait une histoire fascinante à raconter. Mais la situation rend les choses un peu plus... compliquées disons.
Le prêtre fut rassuré par ces quelques mots échangés. Il reprit alors, les autres hésitant visiblement à parler.
- Comme je vous l'ai peut-être déjà dit, je suis arrivé il y a plusieurs semaines à Laälmatl à bord du bâteau que vous avez retrouvé échoué.
« Je venais moi aussi voir le gouverneur pour l'entretenir d'une importante affaire pour le compte de mon ordre...
« Mais on ne m'en a pas laissé l'occasion ! Le petit peuple ne peut plus accéder à son gagne-pain depuis les quais sont clos et se meure à petit feu. J'ai donc tout naturellement cherché à lui venir en aide !
« Je suis heureux que vous soyez arrivés ici en de si... incroyables circonstances ! Les grands semblent disposés à vous ouvrir leurs portes.
« Est-il possible que je vous accompagne ?
Elindine écouta, attentive et quelque peu impatiente. Jusqu'ici le melessë n'avait pas dit grand-chose qu'ils ne sachent déjà. Ainsi, elle ne parut pas surprise quand il demanda à les suivre. Au contraire, le sourire qui glissa sur ses lèvres avaient l'air authentiquement heureux quand elle répondit :
- Très volontiers. Nous ne connaissons que trop peu les différentes... factions de Laälmatl et je ne pense pas que qui que ce soit ici soit contre la présence d'un guide.
« Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ? Et plus encore sur le jeune marchand vêtu de rouge qui nous a convoqué ? J'apprécie de savoir à qui je m'adresse.
Les derniers mots de la femme surprirent le sorcier, qui tendit une main entre le prêtre et eux, comme pour apaiser un trop plein d'enthousiasme.
- Mais n'oubliez pas que c'est à nous qu'il veut parler. S'il vous connaît déjà, il risque de vous prendre pour un profiteur qui s'est glissé parmi nous pour obtenir une audience et si vous vous mettez trop en avant, il risque de refuser de nous parler.
Elindine fronça les sourcils en plantant son regard dans celui de son mari.
- Nous pouvons déjà voir la réaction de ce marchand. Ce sera un bon indicateur pour la suite.
« Et puis je ne doute pas qu'il ait les mots pour éconduire Fëanor si sa présence l'indispose.
Fëanor fronça les sourcils. Ce barbu plutôt antipathique ! A l'exact opposé de sa compagne à vrai dire. Mais il ne s'en offusqua pas et préféra continuer.
- Je n'ai jamais eu l'occasion de parler directement avec sieur Thomas Marlborough à vrai dire.
« Cet homme est un riche armateur et commerçant de la cité. Il a des contacts directs et réguliers avec le gouverneur.
« Il semble lié à une activité particulière qui occupe une bonne partie de la ville...
Le prêtre ménagea une pause, cherchant à lire son auditoire, avant de reprendre.
- Des fouilles... Des érudits, des manouvriers, des marchands et tant d'autres sont impliqués dans cette entreprise au quotidien.
« Cela pourrait être anodin s'il n'y avait pas tant de secrets autour de tout ça.
Fëanor ? Par le ciel si on commençait à lui donner un nom on n'arriverait plus à s'en défaire ! Le sorcier répondit avec son sourire narquois habituel, teinté de condescendance pour l'occasion.
- Oui des fouilles archéologiques sont en cours dans la région. Port Franc a d'ailleurs reçu quelques pièces de valeur et c'est pourquoi notre qualité en tant qu'antiquaires peut être mise à profit ici...
Les yeux de la jeune femme étincelèrent à l'évocation des fouilles, mais elle ne fut qu'intérieurement surprise. Voilà donc ce que son cher et tendre avait omis de lui dire. Pour la peine elle lui aurait bien discrètement écrasé le pied sous la table, mais elle le tourmenterait plus tard. En attendant elle ignora royalement son désagréable compagnon et se concentra sur le joli prêtre à l'air d'autant plus doux que son époux était franchement désagréable.
- Vous pensez que cela peut avoir un rapport avec le monstre dans la baie ?
Fëanor resta interdit à l'affirmation du marchand. Il était plus surpris que vexé par ses explications.
- Dans ce cas... peut-être en savez-vous plus que moi sur le sujet ? Je suis sûr que cela pourrait nous être utile !
« N'est-ce pas ?
- Nous être utile ? Excusez-moi mais quelle est cette importante affaire pour le compte de votre ordre ? Je ne suis même pas certain que nos intérêts concordent ! Combien de fouilles ont dû être arrêtées parce qu'un serviteur d'un dieu de passage était mécontent ?
Nedru rangea un peu de son air condescendant pour redevenir plus diplomate.
- Comprenons-nous : vous voulez aider les gens et je respecte ça. Vous nous avez aidé. Vous voulez parler au gouverneur et nous aussi. Alors je ne veux pas paraître ingrat. Cela dit, nous avons risqué notre vie pour ça et je n'accepterai pas que tout espoir brûle sous mes yeux. Alors racontez moi tout, et trouvons une solution.
Cymbeline remarqua l'impatience de sa consoeur, d'autant plus qu'elle la partageait. Elle aurait voulu parler au loqueteux concernant ses histoires de malédictions. Elle avait peur que l'individu ne lui échappe, si elle tardait trop. Et puis elle avait faim. Très faim. Et elle sentait mauvais. Aussi, elle n'écoutait le prêtre que d'une oreille, tandis que son genou droit s'agitait inlassablement.
Gnagnagnagnagna...
Elle ne releva la tête que lorsqu'une suite de mots particulièrement intéressante éveilla son attention. Ces mots concernaient l'armateur. Si cet homme entretenait en effet des contacts directs et réguliers avec le gouverneur, il venait de supplanter le mendiant du 1er dans l'ordre de ses priorités.
La suite, concernant les fouilles secrètes, n'était pas moins intéressante. Si Gerald lui avait déjà parlé de ces travaux, elle se dit à présent qu'il existait peut-être un lien avec cette histoire de malédiction. C'était souvent le problème, à creuser des trous dans un sol inconnu. On déterrait parfois des choses qui n'auraient jamais dû revoir le jour.
La question d'Elindine fit écho à ses propres réflexions. Mais le prêtre se montra décevant dans sa réponse. Quant aux attaques répétées de Nedru, elle les trouvait plutôt injustifiées : pourquoi ce petit prêtre chercherait-il à leur mettre des batons dans les roues ? Il avait beau être ennuyeux, il semblait aussi curieux et porté vers l'action que leur petite équipe.
A la dernière question du bourgeois, elle fit la moue :
- Dites ? Tout ceci est passionnant. Mais si ces explications s'éternisent, ne craignez-vous pas que l'armateur ne s'impatiente ?
« Peut-être devrions-nous limiter notre échange au strict nécessaire, afin de ne pas risquer de voir cette précieuse invitation s'envoler ? Y a-t-il quelque chose de crucial à savoir, avant de se présenter à lui ?
Fëanor ne se démonta pas face aux attaques du barbue. Déesse, que cet homme est désagréable ! Mais c'était souvent le trait des hommes qui se construisent une façade pour se protéger. Fort de cette conclusion, le prêtre garda son calme et s'autorisa même à sourire. Mais alors qu'il allait s'expliquer, l'halfeline intervint. Elle semblait pressée d'en finir.
- Je suis un servant de Nolwë, la Sage.
« Ma mission n'est certainement pas d'empêcher les savants de travailler, n'ayez crainte.
« Au contraire, certains écrits dans nos archives font mentions d'artefacts ayant un rapport avec La Déesse. Je dois juste m'assurer qu'ils soient manipulés avec les précautions nécessaires... Mais sieur Marlborough n'a pas besoin de le savoir.
Il n'en dit pas plus et concentrait son regard sur Cymbeline quand il reprit.
- Je pense avoir fait le tour des informations importantes. Allons à ce rendez-vous si cela convient à tout le monde.
« Je resterais en retrait... ajouta-t-il en se tournant, tout sourire, vers Nedru.
- Pour vous assurer qu'ils soient manipulés avec précautions, cela me convient. Je veillerai à ce que de telles reliques soient respectées comme il se doit !
En hochant la tête, Nedru tapota sur sa chevalière, comme souvent quand il réfléchissait. Si cet ordre en sait tant, autant en profiter...
- Il n'y a rien d'autre de crucial à apprendre je pense. Soyons courtois !
D'un geste de la main accompagné de la bonne formule, Nedru ordonna aux souillures de quitter ses vêtements ainsi que ceux de sa femme.
La rousse s’ébroua vigoureusement en sentant l’effet du sort sur son accoutrement. Lentement, elle roula des épaules et offrit un sourire reconnaissant à son époux.
- Merci, mon ami. Nous pouvons y aller.
Ensemble, ils quittèrent la chambre pour se rendre en direction de la loge du fameux Thomas Marlborough.
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