Nouveau monde ou paradis perdu ?

« C'est Cymbeline qui l'a sauvé ! »

Quand un doigt se pointa sur elle, la musicienne sursauta, écarquillant les yeux.

C’est bien le moment d’exprimer sa gratitude ! Moi qui essayais de me faire discrète…
(…)
« Une fille "petite-homme-brutale" » ? Qu’est-ce que c’est que ça, encore ? J’en ai entendu de belles sur les halfelins, mais ça…
(…)
Des noyés… Je me demande si cet homme, adossé contre le mur, tout à l’heure…
(…)
C'est normal de voler pour survivre ?? Dit le bourgeois-antiquaire à l’enfant des rues ?

Cymbeline fronça les sourcils, dirigeant un regard réprobateur en direction de Nedru. Elle avait sa propre idée du vol et de la pauvreté. Et se demandait bien ce que Nedru y connaissait, lui. En tout cas, elle ne le voyait plus du même œil. Quelle était cette étrange leçon de morale ? Ce n’est pas « normal », non. Nécessaire peut-être, mais pas « normal ».

Ses réflexions furent balayées lorsque le bourgeois prit sa défense. Elle se redressa alors, avant d’hocher la tête et sourire à l’attention des enfants. Un sourire un peu nerveux, mais elle put difficilement faire mieux.

Aux questions de Nedru, elle en rajouta une :

- Pourquoi n’êtes-vous pas à l’abri des murailles, comme les autres survivants ?

L’histoire d’Elena et la réaction de Joseph la rassura un peu. Elle voyait enfin quelque chose se dessiner entre les mailles de tout ce qu’ils avaient traversé. Mais quoi ? Elle n’en était pas sûre. Elle fronça vaguement les sourcils à la réflexion de Gerald. Elle aurait pu signaler que, sans elle, il n’y aurait probablement plus de second ou de mousse ici pour passer de la pommade sur le courage de la halfeline. Mais Elindine n’en fit rien, consciente que ce n’était pas le moment de chipoter sur qui avait sauvé qui et comment. Seul le résultat comptait : ils étaient en vie.

Son sourire se fit plus naturel quand Nedru lui répondit par l’affirmative et elle hocha la tête discrètement en retour. Elle écouta ensuite les différentes questions que chacun posait, joignant finalement la sienne. Petits hommes brutaux, disait l’enfant pour évoquer les halfelins, une appellation qui laissait la jeune bourgeoise songeuse. « Brutal » n’était pas le terme qu’elle aurait utilisé pour les décrire, même les plus mauvais d’entre eux. Sournois, oui, certains l’étaient, discrets et vifs, indubitablement, mais brutal… Il lui semblait qu’elle aurait dû savoir quelque chose sur un tel peuple vivant en Acoatl, mais rien ne lui revenait. Elle s’adressa alors à son époux :

- Nedru, tu n’aurais pas entendu parler d’un peuple halfelin spécifique à cette région d’Eana ? Ou quelque chose du genre ?

Il la regarda en haussant un sourcil, puis affirma :

- Hmmm… Il y a bien des peuplements halfelins sur ce continent, mais aucun détail ne me revient.

Toujours soucieuse, Elindine se tourna vers Elena, qui semblait bien être la personne la plus au courant ici :

- Quand tu parles de « petit homme brutal », parles-tu vraiment de gens comme Cymbeline ici présente ou d’un peuple semblable mais néanmoins… Différent ? Peux-tu nous en dire un peu plus ?

Elena écoute patiemment le flot de questions qui s'abattait sur elle. Vu sa posture, elle semblait s'y attendre. Quand Cymbeline eut fini, elle prit encore quelques seconde comme pour organiser ses idées. Dans ses bras, Joseph, n'osait plus parler.

- En fait, je ne sais pas trop quand "ça" a commencé. On a toujours vécu à Laalmath. Mais il y a environ un mois, des gens ont commencé à disparaître le long de la plage de la Largue, puis un peu partout le long des digues et sur le port. Personne ne savait vraiment pourquoi. Et puis les bateaux ne sont pas revenus. Notamment le Salamander, qui fait la liaison régulière. Et les pêcheurs ont été attrapés en mer par une bête. Et ça a été la panique. Ils ont fermé le port par sécurité... et on s'est retrouvés enfermés sans trop de ressources.

Elle se tourna alors spécifiquement vers Cymbeline, l'air toujours sur la défensive :

- Si on se retrouve de ce côté des murailles, c'est qu'on est très pauvres. Depuis que Papa est parti, c'est compliqué pour maman. Alors, comme on peut pas faire autrement, on vient chiper des choses sur le port. Mais c'est dangereux.

- Il faut qu'on aille chercher maman, coupa Joseph.

Mais Elena n'y prêta pas attention, se contentant de déposer un baiser sur son crâne tout en lui caressant la tête.

- Et pour les "petits hommes brutals"... ils habitent ici. Il y en a dehors, dans la forêt. Les pires, c'est ceux qui sont en ville. Mais c'est vrai que Cymbaline leur ressemble pas tout à fait : Elle est pas rasée d'abord. Et puis elle a pas le même regard quand même. Et puis j'ai pas vu beaucoup de filles chez eux.

Elle se retourna instinctivement vers la porte. Einarr avait ouvert les yeux mais elle ne s'intéressa pas à lui. Seulement à l'extérieur. Comme si elle voyait ou entendait quelque chose.

- On devrait pas trainer ici... vous comptez aller où maintenant ?

Les questions s'enchaînaient et tous, sauf le dvaerg, trouvaient à faire connaissance. Cymbeline avait beau l'avoir plus ou moins foudroyé du regard (peut être voulait-elle qu'il sermonne les enfants et leur inculque la valeur du travail bien fait pour obtenir de quoi manger ?), les choses se passaient assez bien. Si l'antiquaire avait eu un tant soit peu d'empathie envers son prochain, sans doute se serait-il inquiété du sort d'Einarr, mais avoir saisi une once de mouvement suffit à lui faire valider l'hypothèse qu'il jouait la comédie et que c'était mieux ainsi. Qui avait envie d'un dvaerg aimable mais fou pour rassurer des orphelins qui s'ignoraient ?

Des halfelins brutaux ? Oui, peut être...

L'idée de sa femme sur la nature des peuples qui inquiétaient Elena ne supporta pas longtemps l'épreuve des babillages. Plutôt masculins, plutôt rasés ? On pourrait presque parler d'engeance gobeline si Elena n'avait pas évoqué le fait qu'il y en avait en ville. Encore que... Peut être qu'ici ? Enfin, peu importe !

Sans aller jusqu'à dire qu'il en savait assez, au moins pouvait-il être à peu près certain qu'il pouvait oublier la raison officieuse de sa venue... Il était peu probable qu'une nouvelle négociation du contrat commercial entre le gouverneur local et Vanhuffel soit la priorité de Laalmath dans de telles circonstances. Est-ce que cela pouvait avoir un rapport avec les excavations des œuvres Hozaptek ?

Nedru était en train de réaliser que l'opportunité était peut être justement parfaite pour négocier un nouveau monopole d'échange quand Elena le rappela à la réalité. Où iraient-il ?

- A priori, on nous empêcherait d'aller de l'autre côté de la muraille, mais tu as peut être ton idée sur la question ? Si l'endroit est dangereux, nous n'y passeront pas la nuit ! J'aimerai voir avec ce qu'il reste des autorités de cette ville s'ils savent des choses, et comment mettre fin à cette catastrophe.

Comment profiter de cette catastrophe. Pensa-t-il dans un sourire aimable adressé au charmant morveux qui n'hésiterait pas à bientôt redemander sa maman.

-Et bien sûr, on fera ce qu'on peut pour vous aider, c'est à ça que servent les grandes personnes.

La description d’Elena rappela à Cymbeline une information importante, reçue la veille au soir -- Par les dieux, comme ces instants de quiétude semblaient lointains...

- Je crois qu’elle veut parler d’halfelins pieds-sûrs, mais je n’en suis pas certaine, dit-elle au couple de bourgeois. D’après Gerald, le gouverneur s’était entouré d’une garde formée de cette espèce locale d’halfelins. C’est bien cela n’est-ce pas, Gerald ? Tu disais aussi qu’ils étaient communs dans cette région, je crois ?

[hrp] elle laisse les gens réagir [/hrp]

- J’aimerais aussi retourner du côté des remparts, renchérit Cymbeline. Par contre, Nedru, ne vous attendez pas à pouvoir parler au gouverneur… D’après les lanceurs de cailloux, « on aurait plutôt intérêt à rester à distance de lui et de ses ouailles ». Les rumeurs le disent paranoïaque, dit-elle en se tournant vers Gerald pour obtenir sa confirmation. Mais peut-être qu’il s’est noyé, lui aussi. En tout cas, je doute qu’on ne le trouve de l’autre côté des murs.
« Ca vaudrait le coup d'essayer un peu plus de parler avec ces malappris égocentriques. Ou de voir s’il n’existe vraiment aucun accès vers l'autre côté… Et qui sait, on retrouvera peut-être votre mère, là-bas ?

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[hrp]
Jet d'histoire (1d20 +2 + 1 (touche à tout)) => 4.
Je me suis donc limitée à ce que je savais déjà concernant les "petits hommes brutaux" de la région !
[/hrp]

Les réponses de la petite tirèrent un air soucieux de la bourgeoise. Sans être superstitieuse, ce qui s’était passé et se passait encore dans la ville… C’était plus qu’inquiétant. Se pourrait-il qu’il s’agisse d’une malédiction ? Est-ce qu’une entité puissante et mauvaise agissait dans les ombres des hangars, en plus de cet horrible poisson ? Ou bien il était la seule horreur dont il devait se soucier et le reste n’était que les tristes retombées de sa présence à proximité des côtes ? Et ce mal de tête qui ne s’arrêtait pas…

Elindine s’ébroua et reporta son attention sur le sourire de son compagnon. L’autre avantage de sa barbe c’est qu’elle cachait un peu mieux la fausseté de son affreux rictus. Qu’est-ce qu’il pouvait bien encore trouver d’amusant à leur situation, ce sinistre personnage ? Puis ce fut au tour de Cymbeline de compléter les commentaires d’Elena. Des pieds-sûrs, voila qui satisfaisait un peu plus ses hypothèses et ajoutait un nouveau problème à la liste, déjà fort coquette, de leurs ennuis. Elle soupira puis réunit les quelques affaires éparpillées dans le hangar pour les ranger dans son sac, vérifiant bien qu’elle avait ses armes, son armure et ses outils sur elle. Elle se tourna finalement vers Einarr et Gerald.

- Navrée pour votre travail, je crains qu’il soit nécessaire de bouger d’ici. M. Sand, pensez-vous pouvoir marcher ? elle poursuivit, se tournant vers Cymbeline.
" Je ne sais pas trop ce que vous comptez faire, mais peut-être vaudrait-il mieux le faire de nuit. De jour, depuis les remparts, nous sommes sûrs de nous faire repérer et caillasser. Je suis plus intéressée par l’idée de trouver un endroit sûr en premier lieu. Nous aurons tout le temps de nous pencher sur d’autres problèmes une fois que nous aurons un abri. Pouvons-nous compter sur vous pour nous guider ? finit-elle en se penchant près des enfants, souriante.

Elle ne savait pas trop si elle voulait ou devait se fier à ces deux gamins, mais ils manquaient d'option.

Gerald écouta Cymbeline avec attention et acquiesça à ses propos :

- En effet, Cy, Il y a beaucoup de halflins "pieds-sûrs" dans la région. Il parait qu'ils habitent souvent près des rivières mais en retrait des côtes et cohabitent avec les tribus humaines... ou autres. Et le gouverneur Holderling a en effet une garde prétorienne uniquement composée de halfelins de la région. Il est fasciné par ces petits êtres, qui le lui rendent bien. Ils lui vouent quasiment un culte !

Il ne rentra pas plus dans les détails et laissa parler Elindine. Entendant la question, Sands se mit sur ses pieds "comme un jeune homme" :

- Je suis opérationnel ! fit-il simplement, mais l'on sentait qu'il souffrait encore un peu.

Les remarques des compagnons sur l'impossibilité de rentrer dans la ville agitaient le petit frère qui finit par glousser en entendant la jeune bourgeoise. Il se tourna vers sa soeur en laissant échapper un "rrrrrh" qui semblait s'apparenter soit à de la fierté, soit à une moquerie pour les étrangers. La jeune fille le reçut avec un sourire et un "cchhuut" satisfait que confirmait son petit rictus . Visiblement, elle avait des choses à leur dire sur le sujet.

- Officiellement, la ville est fermée... mais quand on sait où chercher, on peut trouver tout plein de choses. Si vous souhaitez rentrer à Laälmath plutôt que de rester ici, je peux vous faire rentrer dans la ville et personne ne vous ennuiera. Et pas besoin d'attendre la nuit. Vous pensiez sincèrement qu'on habitait ici ? Mais c'est trop dangereux !

A ce moment, Einarr s'agita à l'entrée du hall et s'avança vers eux, faisant sursauter les deux marmots :

- Hé les chtiots, y a du bougé là dehors ! Y des choses qu'c'est pas clair mais j'ai vu des ombres. Faudrait pas se faire coincer ici...

Soudain très inquiète, Elena fila se coller à la porte pour regarder ce qui se passait alentours. Puis, sans faire de commentaire sur ce qu'elle voyait, elle chuchota :

- Il va falloir partir sur la gauche et longer les remparts plus loin. Vous êtes prêts ?

_______________________________________________
HRP : Il va falloir me dire exactement comment vous comptez vous organiser : Fouillez-vous le hangar avant de sortir ? Quelle formation adoptez-vous ? Quand sortez-vous ? Comptez-vous sortir discrètement séparément ou ensemble ? Vous pouvez répondre sur le HRP ou sur Discord avant de poster si besoin, évidemment

Les explications de l’enfant dessinèrent sur ses lèvres un fin sourire et elle hocha la tête avec une forme de respect dans le geste et le regard. Ça, c’étaient des gamins futés et débrouillards comme elle voulait bien en aider, d’autant plus s’ils leur rendaient un aussi gros service. L’annonce du dvaerg, en revanche, coupa court à ses politesses. Elle prit la parole, succédant aux brèves explications d’Elena ; s’échapper discrètement d’un bâtiment, sur un port, ça, elle savait faire.

- On va sortir et progresser par groupe. Je pars en premier avec nos guides et M. Sand. Cymbeline, Gerald, vous nous suivez à un bâtiment de distance, pas plus, pas moins. Nedru, Einarr, vous fermez la marche, même consigne de distance, si vous voyez que quelqu’un a laissé des traces, effacez-les. Si vous avez d’autres propositions…

Elle souleva son sac et le confia à son époux.

- Je porte déjà mon armure et mes armes. Je te confie ce qu’il reste de nos richesses, très cher. Prends-en soin, ironisa-t-elle avec un faible sourire. Ce serait bien de prendre le seau, aussi, on risque d’en avoir besoin et je ne peux pas m’encombrer davantage en étant devant.
« Bien, si tout le monde est prêt, allons-y.

Doucement, Elindine passa la porte, observant les alentours d’un œil prudent. Effectivement, ils faisaient bien de partir. Sans quitter du regard la rue, elle indiqua aux enfants de passer devant, puis les suivit à pas feutrés, à demi courbée, rasant les murs jusqu’au premier croisement. A la suite d'Elena et de Joseph, ils s'engagèrent sur la gauche.

Les sens en alerte, la rousse prenait bien soin de vérifier chaque allée, chaque tournant, préférant une certaine lenteur prudente à une précipitation mal avisée. Tout en observant les alentours, elle notait les cachettes, retraites et autres moyens de s’abriter si jamais les choses tournaient mal. Pour son salut comme pour celui de l'homme qui la suivait, elle s'assurer que le marin ne gâche pas ses efforts, veillant silencieusement sur ses pas ainsi que sur ceux des enfants devant elle.

[HRP : jet de discrétion]

J'aime quand les solutions tombent du ciel, songea Cymbeline, après la proposition des enfants de les accompagner dans Laälmath.

Elle n'ajouta rien de plus concernant le plan énoncé par Elindine et se contenta de rassembler ses affaires en vitesse.
Puis elle s'approcha de Gerald à qui, malgré son ressentiment qui commençait déjà à fondre, elle tendit la main.
Enfin, tous deux prirent leur place dans le cortège, à quelques mètres de distance de leurs prédécesseurs.

Aussi discrète que possible, elle prit garde à ne pas perdre de vue le groupe de tête, rasait les murs et restait attentive à ce qui se passait autour.
De temps en temps, elle jetait un œil en arrière pour voir si les autres suivaient bien.
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[hrp] Test de discretion : 13 [/hrp]

Après avoir vérifié brièvement que Cymbeline et Gerald suivaient à distance respectable, Elindine se glissa dans la nouvelle ruelle à la suite des enfants, le second du Lady Diana sur ses pas. Ils longèrent encore les bâtiments sur quelques mètres, gagnant en aisance. La jeune bourgeoise se sentait comme un poisson dans l’eau, à progresser entre les hangars en toute discrétion. Alerte et vive, c’était comme si les lieux lui parlaient. Même son mal de tête, jusque-là si cinglant, avait été remplacé par une sorte de quiétude éveillée. Un sentiment qui divergeait singulièrement de ce qu’elle pouvait éprouver lors de ses sorties nocturne dans la Cité Franche. C’était nouveau, puissant, physique et elle s’en serait sans doute plus inquiétée si la sensation n’était pas si grisante.

Rapidement ils progressèrent jusqu’à la prochaine étape, dont l’apparence inquiétante plissa le front de la jeune femme. Ils devaient passer par un étroit goulot sombre et encombré, entre les hangars. Le problème n’était pas tant l’obscurité, bien que cela n’arrange pas sa petite troupe composée exclusivement d’humains, mais plus la difficulté à circuler dans un endroit aussi étroit. Si la pénombre ne poserait aucun problème à Einarr, elle ne put s’empêcher de se demander si sa carrure n’en serait pas un.

Les enfants s’en sortiraient mieux que les deux adultes à leur suite. Elindine se faisait du souci pour les capacités de Sand à suivre le rythme. Elle ralentit légèrement, augmentant la fréquence des regards qu’elle envoyait au marin, décalant légèrement son bras pour qu’il puisse le saisir en cas de perte d’équilibre, sans un mot.

[HRP : jet de discrétion]

D'autres halfelins... C'était ça, la menace que craignait Elena ? Si Nedru avait toujours éprouvé une fascination respectueuse pour le petit peuple sans peur, les imaginer en rang et armure à la solde d'un gouverneur, c'était autre chose. Décidant assez rapidement qu'il n'aurait pas beaucoup plus de pitié pour eux que pour d'autres s'ils l'attaquaient, il accueillit la remise sur pied de Sands avec un sourire ravi.

La complicité des enfants l'irrita sans qu'il en comprenne la cause, mais il était satisfait de ce qu'ils avaient à leur apprendre. Et si en plus ils proposaient d'aider ! C'est Einarr qui mit fin aux bonnes nouvelles, vigie discrète et efficace. Le moment était bien venu : ils avaient une destination.

Comme Elindine prenait la tête des opérations, Nedru acquiesça mentalement, passant les sangles du sac sur son dos. Il n'exprima pas à voix haute son refus d'emporter un récipient encombrant, lourd, et qui pouvait semer une piste de gouttes jusqu'à eux, mais il était assez clair à sa posture décidée à suivre les enfants qu'il n'emporterait pas de seau d'eau plein.

Dernier à partir, Einarr lui fit une sorte de grimace rassurante, hochant la tête et plissant les yeux, comme pour l'inviter à passer devant. Nedru s'engagea dans les rues, le dvaerg sur les talons, veillant à suivre la route prise par Elindine, puis Cymbeline non loin.

Avisant la main tendue de la musicienne, Gerald fut d'abord étonné. Il rougit un peu, et finit par saisir sa main avec un petit "Allez, c'est parti !".

Tous deux progressèrent ainsi jusqu'au croisement. Tout au long de leur parcours, Cymbeline sentait qu'il se passait des choses étranges dans les travées des hangars autour, mais sans arriver à en identifier la nature. Des sortes de chuintements, ou d'objets que l'on traîne.

A l'arrivée au croisement, Gerald se prit les pieds dans un seau, auquel il balança un coup de pied. Le seau ricocha légèrement contre la porte du dernier hangar. Ce ne fit pas vraiment de bruit, mais dans le silence pesant meublé de petits échos, le son raisonna de façon inquiétante. Et d'ailleurs, Cymbeline crut percevoir du mouvement dans les ruelles alentours... Avaient-ils été repérés ?

L'halfeline, ne voulant pas froisser son moussaillon, retint de justesse le juron qui lui brûlait les lèvres.
À la place, elle serra plus fort sa main dans la sienne et lui chuchota :

- Ne traînons pas ici...

Elle l'entraîna alors, lestement, à la suite de leurs compagnons, un doigt sur la bouche pour l'inciter à se faire plus discret.

Le milieu de la journée approchait. Le soleil aurait dû leur brûler la peau à cette heure-ci et des gouttes grosses comme l'ongle suinter des pores de leur peau pour sécher instantanément. Pourtant, c'était plutôt une sensation de moiteur intense qui se déposait sur leur corps et leurs vêtements. De gros nuages s'étaient formés, barraient en partie les rayons du jour et donnaient une teinte bleu d'acier à l'ensemble du paysage. Les hangars semblaient plus grands, plus abîmés, plus inquiétants que ce matin. Le chemin plus encombré.

Leur coeur battait à tout rompre sur les quais désertés... Ou apparemment désertés. Car une chose ne pouvait plus être niée. Ils n'étaient pas seuls dans les parages. Et ils le sentaient tous. Mais qu'est-ce qui se cachait autour d'eux ? Etaient-ce ces noyés ? Ou autre chose ? En tout cas la sensation du danger et son caractère invisible rendait chaque seconde éprouvante.

Quand Elindine se glissa dans l'étroit passage entre les docks, elle sentit que la petite frissonnait. Elle agrippa son petit frère et se colla au mur du hangar. Sands fit un sourire rassurant à Elindine et resta quelques pas en arrière, un oeil sur l'arrière et le couteau à la main. Visiblement, le bosco avait repris du poil de la bête.

Derrière, Cymbeline atteignait l'angle et s'apprêtait à se glisser dans la ruelle en compagnie de son Don Juan maladroit. Plus loin, Nedru avait à peine dépassé l'angle. Depuis que Gerald avait shooté dans le seau, quelque chose se passait. Comme si une vague immatérielle se dirigeait sur eux.

C'est le moment que "choisit" Einar pour donner tout son potentiel. Son arme en main, il marchait à reculons, scrutant les coins sombres du port à la recherche de l'étrange menace. Ses naseaux puissants de nain ronflaient un peu de stress. Encore un pas en arrière et... il glissa dans la boue du port et s'écroula dans un vacarme de tous les diables, sa cotte de maille clinquant sur ce qui restait de pavés déchaussés (ou en cours de pose d'ailleurs).

**- Boudiou ! rroh... mais qu'est-ce qui m'a mis donc... **

Commença-t-il à bougler de surprise en s'agitant au sol avant de réaliser l'étendue de son erreur. D'un vague flot trainant et chuintant, le bruit alentour se mua en un mugissement et en tapotements saccadés. Quelque chose arrivait. Ou plutôt... ils arrivaient !

A l'angle de la rue, à une vingtaine de mètres, Nedru et Einar discernèrent au moins quatre formes sombres et difficilement identifiables s'avançant vers eux d'une démarche anormale. Mais ce fut de l'autre côté que la surprise fut la plus grande : Sortant de ruelles adjacentes, deux êtres étranges surgirent au croisement où se trouvait Cymbeline. L'un, juste au nord, avançait vers elle. L'autre était au milieu de la rue, bloquant en partie le passage à Nedru et Einar. Plus au clair, les deux êtres étaient plus identifiables : C'étaient des hommes. Enfin, semblait-il. Leurs vêtements étaient trempés, leur mine semblait délavée et épuisée, leurs yeux presque fermés. Etaient-ils morts ? Ou vivants ? Ou bien les deux ? La question était entière !

En tout cas il allait falloir agir vite !

Forcément… Non, mais forcément ! Qu’est-ce qu’ils n’ont pas compris dans le mot « discret », ces deux-là ? Quels Godichons, j’vous jure… Ah, ils font la paire ! Et voilà que ça rapplique, maintenant… Bien sûr ! Pesta Cymbeline en son for intérieur.

Le visage fermé, elle lâcha la main de Gerald et lui fit signe de rester en arrière. Elle détacha son arbalète de son dos, et visa la silhouette étrange qui s’avançait depuis le nord.

Tout en visant et en lâchant un premier carreau, sa voix s’éleva en direction d’Einarr et de Nedru, un peu plus loin au Sud du croisement.

« Pas de pitié pour les noyés,
On va leur faire la peaaaaau,
Les découper en p’tits morceaux,
Pour les rendre à Éternitéééé ! »

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[hrp]
J'utilise mon avantage pour viser la créature du nord avec mon arbalète => 25
[/hrp]

**GERALD **

Gerald entendit bien ce que voulait cymbeline mais il n'avait pas dit son dernier mot ! Tout tremblant qu'il était à la vue de ce spectacle, il dégagea un de ses couteaux pour se rendre utile.

C'est à ce moment qu'il vit le carreau de Cymbeline partir droit sur le haut du torse de l'humain frippé qu'ils avaient en face d'eux. Le carreau traversa l'épaule et arracha littéralement le bras qui tomba au sol dans un bruit gras.

Encouragé par ce beau geste, Gerald lâche son couteau droit dans l'oeil de la créature. Qui s'effondra au sol, agitée de mouvements et de borborygmes peu engageants. Etaient-ce des hommes ? ou des morts ? ou bien les deux à la fois ? Ils ne pouvaient toujours pas le dire.

Gerald regarda la barde d'un air fier :

- Quand on s'ennuie sur un bateau, on trouve des passe-temps.

Comme après un long rêve, l'esprit embrumé d'Einarr venait de s'éclaircir un peu. "Mais que fais-je par terre… C'est quoi tout ses gens qui font du bruit ? C'est quoi leur problème ? Ma tête…" pensa-t-il.

Il tenta de se relever mais les restes d'alcool et le sol humide du port le firent glisser après seulement quelques mètres. Le nain, retomba lourdement dos au sol, sa tête manquant tout juste de se heurter sur les pavés déchaussés, usées par les années et les embruns.

"J'aurais mieux fait de mourir dans ma mine… C'est ça que vous essayez de me dire ?" cria-il dans la langue natale, allongé sur le dos et regardant le ciel.

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HRP: Jet pour se relever, 1d20+2 ~ [1] : 3
HRP: il crie en nain.

L'avancée dans les ruelles aurait pu bien se passer, mais c'était sans compter sur le taquin Géralt, amateur du « frappe dans le seau aussi fort que tu peux » et de son acolyte nain probablement né à Morsang Sur Orge. Jurant dans sa barbe, l'antiquaire s'immobilisa, pivotant pour ne rien rater du spectacle qui se jouait dans les ruelles.

Son sang ne fit qu'un tour quand apparurent les premières créatures... Vous aimez le bruit, vous aimez la vie ? Charognards ! Des parodies d'hommes, leurs chairs saponifiées et leurs teints trahissaient leur véritable nature ! Cymbeline, en leur tirant dessus, dévoila le grotesque qui les animait, corrompus et morts, victimes des forts jusque dans l'eau delà. Puis, tout aussi vif, l'imbécile bruyant qu'ils avaient sauvé eut le bon goût de réparer ses bêtises en terminant l'ouvrage de la musicienne!

Tandis qu'Einarr, au sol, simulait avec brio en faisant croire à leurs ennemis que contrairement à un nourrisson il était incapable de se hisser sur ses courtes jambes, Nedru effleura du pouce sa chevalière, visualisant des motifs dont il avait jusque là seulement rêvé, qu'il traça brièvement dans l'air. Il prononça la formule gutturale qu'il entendait dans les hurlements de ses cauchemars, pointant du doigt l'un des faux hommes qui souillaient les pavés de la rue tandis que devant lui les runes violacées se matérialisaient en un éclair hurlant.

-Tarrapek’ anverj aghmkot !

[hrp : action bonus : marquer une cible avec le sort Tourment
action simple : une décharge occulte qui manifestement se perd dans le vide ! )

Tour 2

Carte tour 2
Elindine, Les enfants, Sands (15) - Cymbeline (14) - Gerald (11) - Einarr (10) - Nedru (8) - Les noyés (5)

Nedru regarda son flux d'énergie s'éloigner et frôler la créature en face de lui avant de s'écraser sur le mur derrière. Ce phénomène n'eut d'autre conséquence que de détourner l'attention de la cible. Jusque-là focalisé sur la barde et son mignon, le noyé se retourna vers Nedru et fonça sur lui, les bras en avant avec une volonté manifeste de l'étrangler.

La créature ne se déplaçait pas avec une agilité spectaculaire mais, étrangement, l'antiquaire ne parvint pas à éviter la masse se jetant sur lui pour lui écraser la trachée. Il sentit sa respiration se couper, presque un vertige alors qu'une douleur effroyable enflammait son cou, mais avec l'énergie du désespoir, il glissa ses mains entre les bras aqueux, tira de toutes ses forces et envoya un coup de pied dans l'abdomen du monstre gluant.

Autour, il semblait que la tension montait. Derrière Nedru et Einarr, au moins quatre créatures se rapprochaient et se tenaient maintenant à moins d'une quinzaine de mètres. Au nord, deux nouvelles silhouette étaient apparues. Mais le plus inquiétant était la tête qui venait d'apparaître dans la ruelle juste en face de Cymbeline et Gerald, à l'endroit même où se trouvait celle qui avait attaqué Nedru quelques secondes avant... comme si une marée arrivait doucement par toutes les rues environnantes !

Dans la ruelle, Elena et Joseph avaient déjà compris la situation. l'oeil inquiet, se sentant sans doute enfermés entre ces adultes, ils hésitaient. Elena se rapprocha d'un pas vers Elindine :

- Il faut partir d'ici. TOUT DE SUITE ! Ne pas regarder en arrière. Dis-le aux autres et filons !

-Qu'est-ce qu'il y a en haut ? On peut filer par là ? Questionna la rôdeuse.

Sans même jeter un coup d'oeil, Elena répondit :
- Vous pouvez accéder aux toits et éviter les coins sombres mais faudra sauter autre dessus des ruelles pour arriver jusqu'aux remparts. Nous on pourra pas avec Joseph mais on passera pas le sol. On sait faire.

Clairement, elle attendait la réponse d'Elindine pour savoir si elle détalait tout de suite ou attendait encore un peu avec les compagnons. Derrière, Sands attendait aussi, les deux couteaux brandis et l'air plus badasse que jamais :

- Sur l'eau c'est moi qui commande, dans les rues, je vous écoute Elindine !

Un premier bruit de ferraille, derrière elle, l’alerta et elle jeta un coup d’œil par-dessus son épaule : le son ne venait pas de son groupe, mais de l’entrée de la ruelle. Elle resta un instant immobile, aux aguets. Rien à signaler. Elle se détendit à nouveau quand un vacarme soudain, suivi des vitupérations gutturales du nain, se firent longuement entendre. De désespoir, Elindine se pinça l’arête du nez, fronçant les sourcils un bref instant, juste avant qu’un sentiment de danger imminent ne la pousse à s’accroupir davantage, méfiante, alerte. Elle écouta l’ordre urgent de l’enfant tout en se renseignant sur les options qu’ils leur restaient : pas beaucoup. Elle n’aurait pas le temps de gagner les toits, pas plus que de faire demi-tour pour porter secours à Nedru. Au bout de la ruelle, elle entendait les premiers échanges entre Cymbeline et Gerald. Merde, merde, merde, et merde !

- Elena, Joseph, dit-elle d’une voix calme mais inflexible.
« Dites-nous le chemin à suivre pour nous en sortir à partir d’ici et filez, vite.

Lentement, elle se releva et dégagea le passage pour les enfants, les gratifiant d’un sourire confiant.

- Merci pour votre aide, conclut-elle en les regardant fuir à toutes jambes. Braves gosses.
« Sand, aidez-moi à empiler les caisses et les tonneaux qui sont là, de part et d’autre du goulot. Il faut déblayer le plus possible ce passage pour permettre une retraite rapide des quatre autres, tout en nous donnant l’option de boucher cet accès dès que tout le monde sera passé. Il ne faut pas que ces… Je ne sais même pas ce que c’est, mais ils ne doivent pas nous suivre dans la ville. Compris ? Allons-y.

Sans hésiter, la jeune bourgeoise commença à réunir les différents objets qui trainaient dans la ruelle. Il y avait là tout un monceau d’outils et de morceaux de bois qu’ils pouvaient arranger pour former piles, arches et structures facilement abattables dès que leurs compagnons seraient passés. Quand ce serait fini et dès que Cymbeline et Gerald feraient mine de poursuivre le chemin, Elindine demanderait à Sand de se mettre en position. Au passage de celui qui fermerait la marche, ils feraient basculer ensemble leur pile hétéroclite pour créer un encombrement suffisant pour empêcher ces monstres de les pister, ou au moins retarder leur progression. Puis ils fileraient tous selon les indications donnaient par la gamine, en priant pour qu’elles soient justes.

[HRP : conception d'un piège avec assistance de Sand]

La musicienne grimaça lorsqu'elle vit et entendit le bras de la créature s’écraser mollement au sol.
Gerald, sans doute aussi têtu et indiscipliné que la barde à ses côtés, ne resta pas sans rien faire. Son jet de couteau s’avéra même plus efficace que son propre trait. Bouche-bée et dégoûtée tout à la fois, Cymbeline se retourna vers le jeune homme et lui sourit d’un air admiratif.

- Bien joué, Monsieur. Joli coup !

Ils n’eurent pas le temps de se réjouir plus longtemps. La menace semblait se multiplier, et la fillette à l’arrière les encouragea à fuir.
La ménestrelle hésita un instant. Devait-elle assister Nedru et Einarr pour les aider à fuir, ou rejoindre au plus vite Elindine ? Elle jeta un coup d’œil indécis à Gerald. Puis, comme elle se savait lente, elle choisit la deuxième option afin de ne ralentir personne.

- Allons-y, dit-elle à Gerald. Il en viendra toujours plus…

« Filons ! Vite ! cria-t-elle à l’attention des hommes restés derrière.

Entraînant de force le jeune homme à ses côtés, elle détalla de ses petites jambes pour rejoindre Elindine et les autres.